un médicament
pour la mélancolie

 

 

 

archives
(mars-septembre 02)

 

 

 

 

  8.10.02

Nous devons être bilingue même en une seule langue, nous devons avoir une langue mineure à l’intérieur de notre langue, nous devons faire de notre propre langue un usage mineur. Le multilinguisme n’est pas seulement la possession de plusieurs systèmes dont chacun serait homogène en lui-même; c’est d’abord la ligne de fuite ou de variation qui affecte chaque système en l’empêchant d’être homogène. Non pas parler comme un Irlandais ou un Roumain dans une autre langue que la sienne, mais au contraire parler dans sa langue à soi comme un étranger.
Gilles Deleuze, dialogues

la nuit, belle promenade sur remue.net

H me voit lire histoire d'O, le château de cène, histoire de l'oeil et puis l'image, elle me dit : tu fais quoi là, une spécialisation en littérature érotique ?

ça n'est pas une mauvaise idée. en attendant, le texte intégral de l'outrage aux mots de bernard noël est téléchargeable sur remue.net. brillant.

...

une éternité que ce truc était coincé.

une éternité à faire ça, et d'autres trucs aussi (plus tard)
une éternité automne doux feuilles rousses et goût du thé (earl grey)
une éternité...

ceci étant, on sera ravi d'apprendre que l'éternité trouve sa limite dans le génie informatique des ingénieurs dévoués.
thank you sir.

7.10.02

le romantique s'accable du réel, le pauvre est malheureux d'une percussion continue, moi le réel je sais que ça n'existe pas, ça ne m'intéresse pas. la réalité m'intéresse en tant que c'est moi qui la produit, qui l'invente.

LL de Mars du Terrier, via le bloc-notes du Désordre

16.9.02

I love when night stretches out towards infinity, when the time between taking one foot off the ground and placing it just a step in front unfolds from half a second into a full experience of being alive.

dandruff, bits that drop off and stick around

11.9.02

un garçon qui a bon goût : les affinités e-lectives de jerome attal

...

"The city, for the first time in its long history, is destructible. A single flight of planes no bigger than a wedge of geese can quickly end this island fantasy, burn the towers, crumble the bridges, turn the underground passages into lethal chambers, cremate the millions. The intimation of mortality is part of New York now; in the sounds of jets overhead, in the black headlines of the latest editions."


un étrange poème de e.b. white publié en 1949

qui est aussi le nom d'une expo de photos sur 9/11 tout à travers le monde
à paris : 85-87, rue du faubourg-saint-martin, dans le 10ème

here is new york

sur les images partout on voit les gens porter la main à la bouche parce que l'horreur c'est ça peut être d'abord, c'est ce qui ne se dit pas.

certains feraient mieux de se taire.

21.8.02

j'ai déjà du mal avec les titres, en plus on me les pique

un mois d'août à paris...

je fais payer des royalties ?

19.8.02

le désordre c'est l'ordre sans le pouvoir (léo ferré)

comme une envie, la même à chaque fois, de faire son nid dans ces pages-là. je veux bien être la petite chaise bleue de portsmouth, les petits cailloux sur le bord de la fenêtre, je veux bien être une des boîtes qui elle même contient une boîte qui elle même contient une boîte, je ne ferai pas de bruit, je ne dirai pas un mot, je promets je serai sage comme une image, ou bien comme une poupée (russe). je promets oui je me punaiserai sur le mur au milieu des croquis, des brouillons, des dessins et puis je regarderai le monsieur écrire, parce que quand on range un peu, c'est ça je crois qu'il fait le mieux.

12.8.02

les trucs de six heures du matin

Effectively, Boulez and the other serialist composers were into generative music, but they retained their 'composer' title by creating the formulae and dictating the initial tonal sequences for their pieces. By allowing a randomly-selected HTML source to dictate these tonal sequences, I am removing my influence from this part of the equation altogether, resulting in an output which is truly generative in nature.

webplayer, music to watch URL's by...

à six heures du matin, j'avoue, un rien m'amuse.

29.7.02

le manque terrible

tous les jours, plus de quarante personnes arrivent sur le journal en tapant "lettre d'amour" dans google.

je trouve ça effrayant.

15.7.02

traitement exponentiel du réel

cet après-midi, la première page du site internet du Monde mettait la Palestine en avant. un tout petit encart relatait le défilé des champs-élysées pour la fête nationale. tout en bas de l'article, on mentionnait qu'un type avait été arrêté.

ce soir, avant de dîner, les trois lignes sur le type arrêté formait un article bien plus étoffé, toujours en recul par rapport à l'article principal sur la Palestine. on y donnait le nom du jeune homme, le calibre de son arme, le fait qu'il était déjà connu des services de police pour l'avoir déjà utilisée.
il est minuit maintenant, et le Monde titre : le Président Chirac échappe à une tentative d'assassinat.

(à noter, quand même, la réponse du président chirac à l'annonce de la nouvelle, deux points ouvrez les guillemets : "ah bon")

3.7.02

chouchous

J.A point com,
edwood,
jean-pascal
et mark alizart.

ce blog ne blog jamais mais quand il blog c'est pour de vrai

...

ce blog ne sert à rien. c'est révolutionnaire, comme concept. j'ai inventé le premier blog qui ne sert à rien, hip hip hip hooray. vraiment. ce blog ne sert à rien. y'a deux trois liens qui se promènent, de temps en temps la jeune fille se réveille et puis elle écrit un truc, mais pas trop alors hein, parce que elle son truc c'est le journal, et puis le journal et le blog c'est différent, faudrait pas voir à tout mélanger non plus quand même. ce blog ne sert à rien. z'allez voir que tout à l'heure elle va y passer ses petites annonces en se faisant les ongles (déjà fait). ce blog ne sert à rien. X me dit : on n'a pas besoin de commentaires composés. ce garçon a souvent raison, ça m'énerve assez. ce blog ne sert à rien. c'est assez charmant tout compte fait. ce blog ne sert à rien. c'est une raison comme une autre pour continuer.

2.7.02

that is the question

c'est une idée où je change de peau de journal à chaque fois que je change d'amoureux ?

...

message personnel

au bout du téléphone il y a votre voix et il y a les mots que je ne dirai pas etc...

mr bungle ! votre email ne marche pas, ça commence à m'énerver !

6.6.02

next on my i-want-to-marry-you list


comme je m'étais trompée l'autre jour dans l'adresse de mr bungle et comme je suis d'excellente humeur (paris est une ville magnifique) et comme personne d'autre que de rares initiés de mon théâtre mental pourront voir le rapport dans ce galimatias de pensées que la consommation abusive d'alcool dans de petits verres anciens et l'écoute en boucle absolue d'albums tels this is hardcore (ne serait-ce que pour cette phrase extraordinaire qui est : it's what men in stained raincoats pay for but here is is so pure) contribuent très largement à provoquer, j'en profite pour faire un lien vers le très labyrinthique et désespérement brillant site d'edwood jr.

tant d'intelligence me déprime.

30.5.02

that there, that's not me

au téléphone je lui disais : c'est comme si quelqu'un d'autre écrivait le journal. quelques fois (souvent, même) je parle de mon journal comme si c'était quelqu'un d'autre qui l'écrivait. comme si c'était une part de moi que je ne reconnaissais pas, que je n'acceptais pas de reconnaître, comme si le journal parfois était un corps étranger, qu'il m'étouffait, qu'il me vidait vers autre chose. et qu'alors je me sentais flouée.

les nuits de mai. j'ai du mal à écrire. je me laisse porter. j'écoute radiohead. la nuit de mai est longue et douce comme une chanson de radiohead.
that there, that's not me
i go, where i please...

merci, mr bungle.

...

il dit - j'ai pensé à toi.

23.5.02

flûte j'avais complètement oublié ce truc.

26.4.02

bribe and marmelade

oulah, il a du se passer quelque chose pendant la nuit : voilà que je sors en premier dans google...
devant rimbaud et devant uranus
devant les chiens moches, les betteraves à sucre et hamlet
coucou papa, coucou maman...

...

il y a une chambre secrète, c'est celle que je préfère

moi je veux m'endormir toute habillée sur le canapé dans la chambre des demoiselles
et puis partir dans le labyrinthe les yeux bandés avec du scotch ou de la marmelade d'orange
et si je coupe mes cheveux sur un coup de tête ahah
c'est parce que j'ai fait l'amour toute la nuit.

24.4.02

française mais pas comme ça

Voilà-t-il pas que la France vote pour Le Pen à hauteur de 17,2% au premier tour. Une carte de l'Europe révèle au premier coup d'oeil que s'ils continuent à galoper vers la droite, les Français se réveilleront bientôt en Allemagne.
christian mistral, journal 22-04-02


aubry/duhamel : petit dico pour lutter contre l'extrême-droite

22.4.02

j'ai peur. et je me souviens de monsieur X, maire d'un joli village du sud de la france, racontant à mon père que Le Pen lui avait proposé un chèque de 2 000 francs en échange d'une signature pour les présidentielles. monsieur X, assez joueur, avait répondu que là n'était pas son prix. une autre lettre de Le Pen serait arrivée : de combien est-il alors ?

20.4.02

les femmes, la mer, c'est pareil

il y avait ce livre que j'avais du lire pour l'école que je traînais partout avec moi. j'habitais alors aux états-unis. j'avais seize ans. en classe, la prof de lettres se tournait tout le temps vers moi pour que je l'aide à prononcer correctement les noms français. c'était un livre qui parlait de la nouvelle-orléans, de la bonne société créole du XIXème siècle, le soleil, la mer, et puis cette femme, cette femme terriblement libre, un personnage choquant à l'époque, je crois bien que le livre avait été longtemps interdit, l'auteur elle en tout cas très certainement écartée de la bonne littérature américaine.

il y avait ce livre qui, plus encore que par l'audace de l'histoire, l'intolérable liberté d'une femme dans une société patriarcale et conservatrice, me marquait à blanc, ce livre qui s'appelait the awakening et qui, d'un seul coup comme une révélation, m'avait laissée apparaître ce que je n'ai eu de cesse de retrouver depuis, avec un plaisir évident : l'incroyable sensualisme de la langue anglaise.

The voice of the sea is seductive; never ceasing, whispering,
clamoring, murmuring, inviting the soul to wander for a spell in
abysses of solitude; to lose itself in mazes of inward
contemplation.

The voice of the sea speaks to the soul. The touch of the sea
is sensuous, enfolding the body in its soft, close embrace.

Kate Chopin, the awakening

le texte intégral est sur le site du project gutemberg.

18.4.02

i prefer men to cauliflowers

Que l'air était frais, qu'il était calme, plus immobile qu'aujourd'hui, bien sûr, en début de matinée ; comme une vague qui claque ; comme le baiser d'une vague ; vif, piquant, mais en même temps (pour la jeune fille de dix-huit ans qu'elle était alors) solennel, pour elle qui avait le sentiment, debout devant la porte-fenêtre grande ouverte, que quelque chose de terrible était sur le point de survenir ; elle qui regardait les fleurs, les arbres avec la fumée qui s'en dégageait en spirale, et les corneilles qui s'élevaient, qui retombaient ; restant là à regarder, jusqu'au moment où Peter Walsh avait dit : " Songeuse au milieu des légumes ? ­ était-ce bien cela ? ­ ou n'était-ce pas plutôt " Je préfère les humains aux choux-fleurs " ?

Virginia Woolf, Mrs Dalloway

17.4.02

auto-pastiche

cette nuit encore j'ai rêvé du kimono bleu aux dessins rose pâle. du fond de ma mémoire il est remonté comme un costume ancien, un apparat d'époque. du fond de la nuit je l'ai senti tout près, soudain, le frôlement doux de la soie made in taiwan par une enfant surexploitée, la douceur et puis aussi son odeur de lilas, comme un parfum, un parfum remonté du fond de la nuit et du rêve, je dis : un parfum d'assouplissant.

il est là dans mon rêve, le kimono bleu aux dessins rose pâle, dans mon rêve depuis si longtemps le bleu roi de la soie très douce les dessins roses entrelacés dans le dos comme de grands dragons prêts à s'envoler, il est là dans mon rêve le kimono bleu aux broderies roses pâle tant et tant cherché, attendu, inventé, je le vois dans mon rêve je lui tends les mains, - et soudain il se retourne sur son cintre, les yeux des dragons luisent dans la nuit ils sont bien vivants mais ils ne grognent pas, jamais, ils savent que même en chinois le langage est une trappe à rats, je le vois le kimono bleu roi aux dessins rose pâle très pâle soudain il fait un pas vers moi et je me prends dans mes propres bras.

toute la journée, je l'ai porté sur moi comme un voile, la soie, le parfum d'assouplissant et les yeux fous des dragons confondus, mélangés, je l'ai porté sur moi comme on porte un enfant, un rêve infini ou bien la mer étale, quand je le retirais soudain distraite la ceinture qui se défait ou un accès d'exhibitionnisme devant mon ordinateur, j'avais l'impression de mourir de froid.

16.4.02

drunk on plum wine and html codes.

...

le soir tard alors que tout le monde dort, C. d'A. me raconte son histoire. l'histoire de la fille qui danse dans la neige. il dit :

La fille qui danse dans la neige, c'est aujourd'hui pour moi la fille du nord et du froid et des hivers calmes où il ne se passe rien, où l'on ne fait rien, sauf sortir dehors et marcher sous la neige et parler et danser et se lancer des balles de neige. Et le jour, le jour on travaille à la maison. Du moins moi je travaille à la maison et elle fait ce qu'elle veut, à la maison ou pas et moi j'écris et j'écris et je lis et puis je gagne un petit salaire mais c'est pas grave car je fais ce que je veux et puis comme nous sommes dans le nord du québec le loyer est pas cher et de toute façon j'ai beaucoup d'amis dans le village et je répare leurs ordinateurs et la fille qui danse dans la neige elle fait ce qu'elle veut, et certaines fois le jour nous sommes ensemble et nous partons loin de tout, et nous respirons ensemble, et c'est tout.

...

piège sublime

Dans le jeu de la toile je prend le visage du regard des autres. Je est ce personnage fabriqué par ce qu'on croit lire blanc sur rouge. Dans le jeu des correspondances masquées, numérotées, codées; je réponds noir sur blanc. On m'écrit. Je reçois les messages. Mais parfois ce n'est pas à moi qu'on écrit. Je réponds. Mais ce n'est pas mon message qu'on attend.
ann enomy, journal du 14-04-02

15.4.02

de la différence entre un journal et un blOg

sachant que je ne pourrais pas brancher mon pc cette semaine, j'avais dit que je profiterai de ce blOg pour y mettre mes entrées de journal.
et je n'ai pas été fichue de le faire. certaines choses ne s'écrivent pas dans un blOg, dirait-on.

(pardon, ça n'amuse que moi...)

5.4.02

pourquoi je me suis retirée des Bloggeurs 2002

le 26 mars, dans le journal, j'écrivais :

j'ai accompagné E jusqu'à sa voiture. à la station-service, un garçon jeune, en vieux manteau plein de cambouis, le bonnet enfoncé jusqu'aux yeux (bleus). il est penché sur un livre de mathématiques. il lève la tête quand nous entrons. il sourit. nous parlons un peu. il me dit qu'il a dix-sept ans, qu'il est en secondaire, parce qu'il a redoublé. je le sens doux, très doux, dans ses mouvements souple comme un chat, son attention, ses regards. son anglais pur, quand son patron entre et lui demande d'aller nettoyer les voitures, il s'en va en souriant, un peu mélancolique, rêveur, le coeur à l'abandon. je pense - il y a des gens que l'on voudrait protéger de tout, sans rien connaître d'eux, sans rien demander en échange, simplement les protéger, doucement, en silence, pour toujours, quand dehors le vent souffle si fort et que la ville dans la tempête tout doucement s'endort.


le surlendemain, sans d'autres détails et de la part d'une personne qui ne m'avait jamais écrit auparavant je recevais le message suivant :

Hier, mercredi 27, je suis dans mon métro parisien, station Denfert-Rochereau, problème technique, le métro s'arrête. Sur le quai un garçon, pas encore 20 ans, accroupi près d'une poubelle, il pleure, en silence. Son amie le serre très fort. On pouvait ressentir sa douleur, cette douleur lourde à laquelle on peut être confrontée.
J'aurais aimé le protéger de cela.


j'ai écrit à nouveau à cette personne aujourd'hui. je lui ai dit :

il faut que je vous dise quelque chose. cette entrée du 26 mars avait une importance toute particulière pour moi. je ne saurai pas vraiment dire pourquoi. la magie de la rencontre, les yeux trop bleus du jeune homme que l'on souhaiterait protéger, à tout prix, quand bien même c'est moi qui vais si mal, et en pays étranger...

j'ai aimé recevoir votre email, sans préavis, tombé de nulle part, j'ai aimé
recevoir votre email spontané et si simple, qui pour moi disait juste : je comprends.

c'était très émouvant.
je crois quelques fois que je n'écris que pour ces moments-là.

c'est amusant, je me suis retrouvée nominée pour une récompense de type "oscars du diarisme online" cette semaine, et, assez déçue d'avoir été inscrite à cette mascarade sans que personne ne m'ait demandée mon avis, j'ai écrit pour demander que l'on supprime mon nom des nominés. le type m'a répondu tout à l'heure un mail du genre : "tant pis pour toi si tu ne veux pas que ton journal bénéficie de plus de pub." ce type-là n'a décidément rien compris. je me fiche de sa pub. je n'écris pas pour être lue en masse. j'écris pour être lue, certes, mais par des gens comme vous, apportés par la nuit, l'étrangeté, le hasard, des gens qui comprennent, qui font l'effort, qui se fondent à ça, et qui s'en vont, peut être, après, le coeur un peu plus léger et le sourire aux lèvres.

bien à vous,
O.

non mais sans blague.

4.4.02

ceci n'est pas un blog

ceci n'est pas un blog. je veux dire : ça ne parle pas d'ordinateurs. ça ne parle pas de trucs toujours très drôles. ça n'est pas au courant de tout ce qui se passe dans le monde. ça n'est pas plein de tests et de quizzes et de photos d'anime japonais. ça n'est pas mis à jour toutes les dix minutes. ça ne sert pas à se faire des tas d'amis. ça ne parle peut être même pas d'internet. alors...
mais même ces trucs-là ne sont pas des blogs.
ceci n'est pas un blog, ceci est ce que je fais d'un espace donné. je le remplis de mots, d'images, de textes, d'extraits, de choses qui me touchent, comme je fais dans mes cahiers.
ceci n'est pas un blog. depuis le début je voulais le préciser sans savoir comment le formuler. ceci est tout ce qui déborde de moi, du journal, c'est pareil.

et j'adore abajourproject.

...

incandescence

le chef de gare veut me vendre des billets de loterie. j'en achète et je les donne à June, en lui souhaitant bonne chance. c'est lui qui profite de mon envie de tout donner à June, June à qui l'on ne peut rien donner.
comme nous parlons un langage secret ! tout en nuances, en abstractions, en symboles, en tons au-dessus ou en-dessous. puis nous retrouvons Henry et Hugo, encore pleines d'une incandescence qui les effraie tous les deux. Henry est mal à l'aise. Hugo est triste. quelle est donc la nature de cette magie que nous nous offrons mutuellement, June et moi, lorsque nous sommes ensemble ? miracle ! miracle !
hier soir, après June, toute pleine de June, je ne supportais pas que Hugo lise les journaux et parle de "trusts" et de ses succès de la journée. il a compris - il comprend vraiment -, mais il ne pouvait pas partager, il ne pouvait pas saisir cette incandescence. il se moquait de moi. il plaisantait. il était adorable et chaleureux mais moi j'étais incapable de revenir vers lui.

aussi me suis-je allongée sur le divan et j'ai pensé à June, tout en fumant. à la gare, je m'étais évanouie.

anaïs nin, henry and june (1932)

3.4.02

qu'est ce qu'il ne faut pas entendre (à la radio entre boston et new york)

- women and minorities are also encouraged to apply.

- we promise you no explicit lyrics on the radio. we have families, just like you, and we know what you want for your family.

- making sure there's a man around the house when the boy is between 24 months and 5 years of age would help avoiding disorders such as homosexuality.

... hum.

...

décadence

Times Square, le bout de la civilisation. l'image fragmentée, mille fois répétée, dans les miroirs des buildings, dans les glaces, les panneaux, et le ciel. on ne distingue plus la nuit du jour. tout se fond, se confond. visages souriants, heureux, magnifiques gagnants de la société de consommation. tant de dents et tant de mains tendues en avant. la publicité reine mère, étalage du paradis promis. l'information qui circule sur des bandes passantes, tout en vrac et rien de trié. surcharge et surenchère. trop de bruit, trop de gens, trop de couleurs, la saturation des sensations. la foule qui se presse, fatiguée, poussant, cahin-cahant, mécanique. métropolis, le retour. j'ai le coeur qui déborde.

Times Square, la décadence. la civilisation poussée à son extrême, son délire, son paroxysme. le bout de la technique. dans le taxi pour rentrer, je ne peux plus me retenir de pleurer.

2.4.02

I live in New York, and I was thinking about the lagoon in Central Park, down near Central Park South. I was wondering if it would be frozen over when I got home, and if it was, where did the ducks go? I was wondering where the ducks went when the lagoon got all icy and frozen over. I wondered if some guy came in a truck and took them away to a zoo or something. Or if they just flew away.

j.d. salinger, the catcher in the rye

29.3.02

- ...name rings a bell, I probably know him from the dorms or something.
- Faulkner is an author, you probably know him from English 1A or something.

via in passing.

28.3.02

ce blog aurait pu s'appeller la vie extérieure, la vie immédiate, ou bien encore, la vie matérielle. mais tout est déjà pris, et pas par n'importe qui. alors il s'appelle un médicament pour la mélancolie. c'est pris aussi, par bradbury. il ne m'en voudra pas. pour les heures tristes, le traitement par les mots et le violet saturne, il me fallait bien ça.

...

adventure

Alice took a pillow into her arms and held it tightly against her breasts. Getting out of bed, she arranged a blanket so that in the darkness it looked like a form lying between the sheets and, kneeling beside the bed, she caressed it, whispering words over and over, like a refrain. “Why doesn’t something happen? Why am I left here alone?” she muttered. Although she sometimes thought of Ned Currie, she no longer depended on him. Her desire had grown vague. She did not want Ned Currie or any other man. She wanted to be loved, to have something answer the call that was growing louder and louder within her.

sherwood anderson, adventure, in winesburg, ohio (1919)


je me souviens de la réaction bien-pensante de mes camarades de classe en hypokhâgne : "oh my god, that poor woman, how shameful to be a spinster and live her whole life on her own". duh. moi j'adorais cette phrase : she arranged a blanket so that in the darkness it looked like a form lying between the sheets, je trouvais ça terrible, brillant, le personnage grotesque poussé au bout de sa solitude, sa mélancolie et son désir jamais nourri. ah. "but we ALL live on our own, girls."

quoi qu'il en soit, le texte complet et l'ensemble des nouvelles et bien d'autres choses encore sont en ligne sur Bartleby.com. yumm.

27.3.02

autobiographie du jour

5 bonnes raisons d'être de bonne humeur :
- j'ai commencé d'écrire mon esthétique de la rencontre (en commençant par le chapitre 25 : le jeune homme dans l'avion)
- sylvia plath : can a selfish egocentric jealous and unimaginative female write a damn thing worthwhile ?
- mark alizart
- le journal de catherine jamieson, retrouvé sur the wayback machine
- la ville étrangère sous le silence ouaté, délicieux de la neige
- FIP depuis le bout du monde.

flûte ça fait six. je suis vraiment de bonne humeur.

25.3.02

Ulysse est un bloggeur

j'ai passé la matinée à lire l'Odyssée sur le site de jean-philippe marin. c'est drôle comme tout de suite, il apparaît très clairement que le voyage d'Ulysse est un voyage initiatique, un voyage qui l'emmène de la ville détruite de Troie jusqu'à sa patrie d'Ithaque en passant par différents stades : les Lotophages (le bébé qui ne fait que manger et boire), les Cyclopes (l'homme dans la Nature, sans technique ni culture), Circé (passage du stade animal au stade humain), le royaume des morts (conscience soudaine de sa propre mort), les Sirènes (la tentation sexuelle, l'amour dans la mort, eros/thanatos), Charybde et Scylla (le destin, la force implacable de l'inéluctable), les troupeaux du Dieu Soleil (sens de la propriété, éthique d'un "contrat social" à la Rousseau), Calypso (renoncer au désir de vivre dans la jeunesse éternelle, divine), Nausicaa (l'entrée dans le monde humain enfin : le respect, la pudeur, la morale), et puis le retour à Ithaque (reconnaissance sociale : situation dans une famille, une terre, une patrie, un sens de la justice, de la responsabilité, et puis, plus que tout encore, l'accession à une identité propre : Ulysse déguisé en mendiant se révèle par sa force et son intelligence et, au bout de son long voyage, recouvre son identité d'Ulysse, fils de Laerte, roi d'Ithaque)

Ulysse, c'est aussi le "maître des liens". il connaît les cordes et les filets, il noue et dénoue les amarres, les cordages de ses navires, le langage. à ce titre, comme le dit
mark alizart (de l'Ecole Anormale Inférieure de la rue Mul), il est comme Homère, le "couseur de vers", il reconstruit son histoire à partir de fragments, il élabore le mythe, il recrée son histoire dans le langage, comme une tapisserie, comme Pénélope elle-même fait et refait le destin sur sa tapisserie sans fin.

Ulysse, c'est un trickster, un poète, chasseur, matelot, un maître des liens, comme les Parques. son histoire est fragmentée, chaotique, portée d'île en île qu'il relie de par ses mots, son langage, comme d'immenses fils, des cordages. un bloggeur, quoi.

22.3.02

i want to live each day for itself like a string of colored beads, and not kill the present by cutting it up in cruel little snippets to fit some desperate architectural draft for a Taj Mahal in the future.

sylvia plath, journal (dec 11, 1955)

...

description chromatique du jour :
robe - prune foncé
pull - andrinople
collants - ébène

la couleur de ce blog, c'est violet saturne. ça n'existe pas encore dans le dictionnaire des couleurs, mais c'est le nom de mon rouge à lèvres préféré.

...

bon alors, il y a déjà le journal. et puis maintenant il y a aussi le blog. non monsieur ça n'est pas pareil. le journal c'est la vie intérieure, ça ne rigole pas. le blog, c'est le reste. et voilà.