et puis dressée au bord du gouffre...
la maison folle où je t'attends

28.3.07

oh Sylvia...

difficile de présenter Sylvia Plath : née sur la côte est des USA en 1932, merveilleux exemple de réussite (université prestigieuse, Yale boys, poèmes publiés dans des revues) et de ce qui va avec (sentiment d'imposture, crash émotionnel, tentative de suicide), il paraît qu'il y a un chapitre à faire sur son deuil jamais réalisé de la perte de son père, il y a surtout son angoisse de devoir choisir entre l'écriture et la vie de douce femme mariée, son attente de l'enfant, son appel de l'homme vrai, il ne faut pas oublier le surgissement du corps, dans le plaisir et dans l'angoisse, dans la fiction, dans la poésie, et puis les pages splendides, fines, immenses, dangereuses, de son journal - journal tenu de ses 12 ans jusqu'à son suicide peu avant ses 30 ans, et dont son cher mari Ted Hughes a tout simplement supprimé les derniers cahiers sans doute pas bien souples à son égard ; ce qui a, pour résumer très grossièrement, propulsé SP au rang de victime et d'icône féministe dès les années 70. femme entravée, femme trahie, femme censurée : ce sont des arguments (et je suis comme toutes les autres, je déteste Ted Hughes jusque dans ses lamentables préfaces d'Emily Dickinson) mais la vraie question reste celle, globale, fondamentale, jamais résolue, de la création poétique - et de la création poétique pour une femme :
"Can I write ? Will I write if I practice enough ? How much should I sacrifice to writing anyway, before I find out if I'm any good ? Above all, CAN A SELFISH EGOCENTRIC JEALOUS AND UNIMAGINATIVE FEMALE WRITE A DAMN THING WORTH WHILE ?" (Sylvia Plath, Unabridged Journals)
alors, quelques pistes de lecture avec tout d'abord un très bon site, très complet, avec notamment une page "Sylvia Plath for beginners".
le SylviaPlathForum est d'une belle exigence : on y trouve des mp3 des poèmes enregistrés par SP pour la BBC, beaucoup d'articles, et tout récemment des extraits de la correspondance jamais publiée ni traduite des archives de la Lilly Library
parmi beaucoup d'articles, pas mal de trucs sur findarticles.com, et puis celui-ci sur la Gale Literary Database, qui rappelle cette fracture du moi dans l'écriture intime ("her dual consciousness of self as both subject and object") ou la littérature confessionnelle, puisque SP est souvent classée dans la case "confessional poetry" avec Anne Sexton ou Robert Lowell
à suivre aussi : le plath-hughes project de tant mieux
à voir enfin, the real Sylvia Plath, un article qui rebondit sur l'édition tant attendue de son journal non censuré en 2000
(je me souviens que je l'ai acheté à New York - les magnolias étaient en fleurs, ils avaient deux semaines d'avance sur ceux de Montréal - et je l'ai traîné partout avec moi depuis, pour n'être jamais seule)

quelques machins en français sur wikipedia, sur le club des poètes, et un bon article de T. Tuhkunen-Couzic de l'uni de Nantes : "autobiographie en progrès"... bien sûr il faut aussi signaler, chez le franchement nécessaire Jean-Michel Place, un petit bouquin lieu de rencontre entre SP et Valérie Rouzeau, très fin.

pour lire Sylvia :
230 poèmes en ligne
The Bell Jar a été traduit en français sous le nom La Cloche de détresse
les Journaux ont été traduits par Christine Savinel chez Gallimard ; ils sont forcément purgés, puisque parus avant l'édition "complète" américaine de 2000 qui fait autorité (Anchor Books, édition établie par Karen Kulkil de Smith College), mais c'est toujours plus fiable que l'édition dite des Carnets Intimes de 91, découpée n'importe comment...
Françoise Morvan et Valérie Rouzeau ont traduit Winter Trees et Crossing the water (Arbres d'hiver suivi de La traversée, chez Gallimard)
Ariel a été retraduit récemment par Patricia Godi de l'uni de Clermont-Ferrand, qui organise à l'automne un colloque sur les femmes-poètes du XIX° au XXI° siècle
à voir aussi, le bouquin de Sylvie Doizelet : La terre des morts est lointaine : Sylvia Plath, chez Gallimard

- eh bien, c'est tout pour cette nuit.

"I know pretty much what I like and dislike ; but please, don't ask me who I am." (SP, Unabridged Journals)

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