l'immédiate
journal d'O.

 

 

l'entre-deux villes

20.11.03

café Beaubourg - en retard - le désign impeccable, des fenêtres comme au cinéma ouvertes sur la place au lointain et les enfants qui courent dans des nuées de pigeons, j'aime énormément l'éclairage jaune et calme, les grandes rampes chromées, ne dites rien je sais que vous vous étiez volontairement assis dans le fond, à l'étage, pour me voir arriver de très loin, et j'ai marché tranquille, en souriant à peine, comme il se doit, jusqu'à vos mains offertes que je n'ai pas touchées. je fais l'enfant, l'hautaine, l'absolue désinvolte - vous me regardez décortiquer mes crevettes comme si j'étais un monstre sacré - c'est trop : oh, vous n'allez pas vous y mettre aussi ! j'ai l'impression que je flanque une trouille bleue à la moitié de Paris ! vous m'énervez prodigieusement, je vous aime, je ne sais pas, je m'en fous, je n'ai pas le temps, je m'en vais dans un peu plus d'un mois et puis la vie m'appelle, ailleurs, il ne faut pas m'en vouloir de mes colères, mon orgueil, ma froideur - il est difficile, profondément difficile, le moment de l'entre-deux villes, tout mon coeur à Paris, mes désirs à Tokyo (n'est-ce pas que c'est fou, de dire seulement ce mot : Tokyo ?), un pont de sensibilité qui quelques fois se rompt, cette machine de mon corps qui me semble soudain si étroite et si fine quand je voudrais d'un coup y accueillir le monde.

 

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