l'immédiate
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Jackie 15.10.03 Jackie avait le visage fin comme la pluie, les mains d'une pianiste, de soyeux cheveux noirs. elle parlait le français, elle aimait la politique, elle était tellement fière de son prénom - Jackie, disait-elle, you know, like Jackie Kennedy. elle avait dix-huit ans. elle venait me chercher le soir, avec son fourreau noir et les perles de sa mère, pour aller boire des milk-shakes au grand bar du Plaza. il y avait un homme, un Israëlien en smoking blanc qui lui faisait la cour, elle lui jetait des miettes comme à un enfant de dix ans, on partait en voiture, on écoutait Radiohead, Bach, Gainsbourg ou bien les Clash, on traînait à Westport dans les cafés concert, à dix heures on rentrait à l'école pour la fin du home game et s'en aller finir la nuit avec les types de l'équipe adverse - ceux de Rockhurst High avaient notre préférence : Jesus, disait Jackie, an all-boys catholic school ! elle s'amusait de tout. on allait au tennis jouer la nuit sous la pluie. on regardait de vieux films français que je louais juste à l'angle de la rue, et chaque fois que je les ramenais en retard, plutôt que me faire payer une amende, le jeune type aux yeux gris me demandait quelle était la capitale de la Floride, du Vermont, du Montana - grâce à lui, en un an et avec l'aide de tous les clients du video club, j'appris par coeur toutes les capitales d'état. Jackie disait tout le temps qu'elle voulait s'en aller, qu'elle aurait voulu naître européenne et puis pour elle ça voulait dire - être un peu plus distinguée. elle était d'une finesse et d'une radiance incroyable. j'enviais son aisance à la vie que je trouvais toute américaine - la désinvolture. elle enviait mes manières et puis ce qu'elle appelait : french demeanor. je l'ai vue pour la dernière fois il y a deux ans, à Paris, penchée riante et belle aux rotondes du pont-neuf. elle faisait son droit à Washington. elle était amoureuse d'un Français. elle portait une veste de smoking à la Yves Saint Laurent et puis les mêmes lunettes - célèbres, noires et longues à grands verres - que Jacqueline Kennedy.
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