breathing under water...
... living under glass

(un journal online)

 

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22.08.01

un nid dans le neuf (où l'on se love dans le blanc comme dans l'oubli)

indéfiniment je reprends la même phrase. comment écrit-on la première page d'un nouveau journal ? avec quoi la remplit-on ?

tout est tellement étrange depuis qu'il est parti. il. l'homme aux mille noms, aux mille visages. l'homme aux mille sourires, et qui garde tant de soleils dans ses poches. l'homme, l'enfant, le fou l'emporté le vivant, le mien...

(j'avais parié que de toute façon, avec son absence, j'allais finir par tomber dans la guimauve...) oui mais quels sont les mots alors ?

avec quoi remplit-on une absence... ?

avec des mots, avec des rires, même forcés, tirés du fond de la gorge. je suis restée quelques jours avec céline dans la maison aux volets rouges après qu'il soit parti. je suis restée dans la chaleur de cette maison de mon enfance à regarder la pluie battre les vitres. un soir, le téléphone a sonné. j'ai décroché. il avait un tel sourire dans la voix que je m'en suis voulue d'avoir cru un seul instant que son absence pouvait changer le cours des choses. le cours de nos choses.

car elle ne changera rien, cette absence. presque rien. je garderai mon rire, et mes cheveux au vent. je garderai mes mots, mes moments de doute et d'euphorie. je garderai mon goût du rouge, du rêve et des nuits blanchies à la craie virtuelle de ce journal. oh, bien sûr de cela aussi j'ai douté. je suis rentrée chez moi dans le dégoût de mon écriture, le dégoût et l'épuisement futur de tant de temps passé sur du néant. j'exagère ? non. je voulais tout arrêter. dans la voiture, alors que maman cherchait les stations de radio, je me disais que j'étais fatiguée. que je m'étais lassée de ce petit jeu. que plutôt que me libérer, ces pages m'enfermaient à l'intérieur du langage. que ma propre écriture me tuait. des choses comme ça.

et puis dans ma boîte aux lettres, il y avait des gens qui m'attendaient. des gens qui percevaient mon absence. petite égoïste. je ne suis pas toute seule. je n'écris pas que pour moi. j'écris pour... le hasard de celui qui viendra, et quand en plus c'est un gros tigre au dos rond qui aime les sandwiches au thon, alors je m'incline et je continue. merci, mathieu, pour la douceur et la discrétion. merci, le monsieur mangeur de doigts. merci, la belle du matin et l'explorateur des steppes. merci, le monsieur au nom bleu, constructeur de cathédrales connues de moi seule. merci, enfin, monsieur papa poule de donner un nouveau sens parfois à mon journal-page en plume de paons...

tant pis pour la douleur. tant pis pour le temps que j'aurais pu passer à travailler consciencieusement. tant pis pour les doutes et les angoisses de la feuille blanche. tant pis pour la peur de déplaire. tant pis pour tout. je reprends ce journal dans un jour nouveau, je reprends ce journal au creux de la nuit pour y verser tout mon blanc. le blanc-douceur, le blanc-pureté, le blanc-transparence de mes, euh, pensées. here we go.

du blanc, tellement de blanc, pour combler le temps et étouffer le manque de l'absent.

journal - écrire - après