l'immédiate

journal d'O.

jeudi 3 octobre 2002

je n'ai aucun désir extérieur. mettons : aucun projet, aucune envie. je ne sais pas vivre à long terme. je ne me nourris que du moment, comme les enfants, le moment de mon corps. je suis quelqu'un à qui on ne peut raisonnablement pas faire confiance pour le futur. le futur pour moi c'est le moment où je ne suis pas et c'est aussi : le travail fatigant de trouver tous les jours des excuses pour rester vivant, les amours toujours à venir, tous les avions que je peux prendre pour m'en aller et fuir. j'adore. je n'ai aucun désir extérieur qui ne soit un désir immédiat, je suis dangereusement disponible. je dis à H : les deux seules choses qui m'ennuient le moins dans la vie c'est écrire et puis lire alors voilà, à défaut d'autre chose, je passe mes jours à ça. A m'écrit : arrête donc ton cirque, va à l'école, inscris toi dans un club de sport, sors le samedi. je dis : je peux pas. ça le fait rire, mais je sais bien qu'il ne comprend pas. ce que je peux, ce que je veux, c'est lire le château de cène toute la nuit, prendre le train très tôt et marcher sous la pluie, acheter du pain, goûter avec ma soeur sur la table ronde de la cuisine, l'aider à faire sa disserte de philo, coder du html comme une barbare, préparer le dîner en écoutant un disque, me fondre dans le grand canapé pour écrire et puis rêver des mains de l'homme, ses deux mains blanches autour de mes épaules quand toute abandonnée j'offre ma gorge comme au sacrifice.

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