l'immédiate
journal d'O.

 

 

samedi soir

18.10.03

et puis il y a les soirées où les hommes parlent d'argent, de beaucoup d'argent, de voitures, de voiliers, de maisons étrangères, de politique aussi - jamais rien d'autre que d'eux mêmes. la référence la plus commune, c'est la publicité. tout est matière à rire, l'humour bourru, potache, la fausse virilité. qu'est ce que je fais là ? le champagne est très bon, les couverts sont en argent, le repas a juste ce qu'il faut de simple et de champêtre. les femmes se taisent en bloc, ou bien parlent bas entre elles, des plats et des enfants. je pars très vite en croisade. il ne faut pas laisser le discours politique et social aux mains des hommes seulement. j'aime bien dire les choses qui fâchent, désinvolte, en tendant mon verre vide, grand sourire innocent. - oh mais vous êtes si jeune ! me dit-on doucereusement. je connais la chanson. - vous avouerez que cela n'empêche pas d'être intelligent ? ils avouent. ils s'emmêlent. ils disent allons bon ce ne sont pas des sujets très importants et je dis : au contraire. perdus d'avance ou pas - je n'abandonne pas ces combats-là. inventio, dispositio, elocutio, actio - captatio benevolentiae au fond de mon décolleté - je fais mon cinéma. un type s'obstine un peu, alors quand il se lève je me lève en même temps pour le plaisir futile de le dépasser d'une bonne tête, un autre me suit partout et je pense cours toujours, je sors dans les jardins, je fuis dans les étoiles, sous la véranda bleue il me rejoint enfin tenant une coupe de champagne dans chaque main et puis je ne sais pas vraiment ce qui me prend - bien sûr je sais très bien : je fais comme Diane dans Trainspotting, je vide mon verre d'un trait, et puis le sien, et tranquille je m'en vais en souriant l'air de rien.

 

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