l'immédiate
journal d'O.

 

 

dans le train vide vers les montagnes d'abord coupant la brume en traveling incroyable par les grandes baies vitrées et puis parce que nous sommes heureuses que nous aimons la vie révélée des hommes qui travaillent à l'attention du monde nous rions folles et impressionnées de la vitesse dans la cabine ombrée de sueur et de poussière de la locomotive, assises au haut des gros tabourets piquetés de vieux tissu à carreaux qui font les premières places au cinéma splendide de la réalité - le train s'engouffre dans un tunnel, rien ne bouge que nous mêmes à peine rien ne souffle rien ne blesse je crois que jamais la lumière ne va revenir mais ta main dans la mienne chaude de ta maladie douce et l'amour d'aller vite, je ris tout le temps - c'est si simple, c'est sans mot, c'est ce bonheur fou en furie sur la brèche c'est la mâchoire du siècle fermée un jour sur nos vingt ans et dont nous nous dégageons à force de rêves et de luttes intérieures, c'est cette machine brinquebalante du monde lancée seule sur les rails, les glissements de terrain, les ponts chancelants, les images, c'est la beauté farouche des grands trains vers le soir, ceux qui sauvent la vie, qui lui ouvrent par avance la nostalgie immense des pays inconnus, c'est la nuit qui s'installe, l'amitié branchée des caténaires la plus belle ligne de fuite.

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dimanche 27 août 2006