l'immédiate
dans le rêve l'enveloppe couleur crème, l'encre noire, quand d'une écriture lente, longue comme une respiration de nageur, la main de la femme étend une adresse : nova... scotia ? nova... zelandia ? dilué à la masse de l'effort, avec des chiffres dansants qui semblent appeler des codes, des trésors, latitudes libres du sommeil. "Vieil océan, tu es le symbole de l'identité : toujours égal à toi-même..." c'est dans l'eau chaude et vivante du bain que je retrouve Lautréamont, et puis les démembrements sauvegardés en secret de la nuit : la main blanche est tenue d'une bague d'ivoire à l'annulaire, il y a l'idée d'un animal, il y a le mot fulminant : corsaire. Vieil océan... sur la côte ouest, tout près d'Hokitika, la forêt de rimu et de totara saisit la mer et les pluies torrentielles jusque dans son coeur d'écorce, rouge comme le sang versé de Tuna Roa. une main froide et profonde descend entre les ailes tronquées des omoplates. Vieil océan... si les chiffres s'agencent c'est au sextant de la nuit d'une goélette perdue ou bien aux traces des anciens navigateurs maoris, héros inconnus à l'écoute du sensible qui tressaient en fines baguettes de bois souple la carte des courants des écueils des merveilles de leur terre qui est aussi, surtout, la mer. Ainsi l'enfant-dieu Maui pêcha Aotearoa, le long nuage blanc du fond des mers, dit le manuscrit de Te Rangikaheke. toujours, cette magie simple et nécessaire. l'enveloppe de couleur crème sera laissée à l'obscurité du tiroir d'une commode, ou pas, la femme qui écrit maintenant se tient sur le pont d'un voilier, sur le vent, sur la vague, seule femme à bord et elle dit d'un air sûr et serein : il y a une longue bête blanche qui nous suit. aux tréfonds de la carte, à ses erreurs aussi, il y a une présence qui est absence de peur, un animal puissant, conscience mouvante et qui porte dans sa chair des secrets et des heurts, un ambre épais suintant comme le désir. il y a une longue bête blanche qui nous suit. en proue dans ce corps impossible, en mal du monde et nostalgie, ignorante de chaque chose et jusqu'à l'eau qui mouille mes cils et mon visage dans le souvenir verdoyant d'Hokitika, toujours cette force étrange, impénétrable navigue en moi, quelquefois elle surgit à surface pour respirer au rêve.
avant -
après mardi 4 juillet 2006 et puis
je pense à vous. |