l'immédiate
jetée dans la ville et la chaleur. dans la rue c'est la grèce, l'italie, c'est grands secrets de foule rumeur profonde immense le moteur des vespas les alarmes et les cris - je ferme les yeux, très douce - l'air liquide tombe en moi toujours si facilement, et ivre, et absolue, la peau fond dans l'élan, bras modelés encore de couleurs et d'enfants, le ventre fort, jambes de bitume la poitrine toute prise et la ville un instant est réelle, tangible, vivante dans l'allure et la peau le long des boulevards clairs - L a posé sur mes yeux abîmés sa grande beauté et ses lunettes de soleil, assise en terrasse je joue Paris dans ses rues de clichés, tout nous amuse, tout nous plaît, la quotidienneté usée aux angles du quartier, et je l'aime la vieille femme qui traverse la rue ses robes sales sous le bras pour les porter à pas très lents jusqu'au lavomatic, je l'aime le type yeux fous au zinc et qui ne parle pas, les jeunes maçons menton fier, leur somptueuse ardeur d'évadés, les filles lunettes Prada américaines peut être qui battent la rue encore de leurs sandales plates et leurs cris et leurs rêves - je pense à M, juste ce qu'il faut, et comme je te suis attachée si profond et ça n'est plus un choix - je ne quitte pas des yeux la jeune fille aux mains blanches qui erre dans les boutiques qui cherche pour se cacher une robe insolente un truc chic et rétro une armure comme une autre pour bercer la blessure d'être un corps neuf au monde, si douce la vieille dame chinoise et qui de son petit arrosoir bleu arrose les pavés tout autant que ses massifs c'est le territoire en elle qui appelle le soin et le souci de chaque chose à part égale, je n'ai besoin de rien mais je resterai encore sous l'auvent de l'épicerie l'odeur des fruits mûrs qu'un garçon aux cheveux sombres étale dans des paniers, à sa main un bracelet d'argent et le soleil donné - je pense aux yeux de M, généalogie farouche de mer Egée, Asie Mineure, et surgissant du confluent des grands courants qui m'appellent - je pense, la ville m'emporte, étalage ridicule des voitures déguisées et des banderoles muettes d'une école d'ingénieurs qui finit publiquement son année, jeunes filles en meute le code secret de la superposition de leurs vêtements choisis, des enfants qui déboulent, des couples de touristes qui prennent les clichés pour des passages secrets, il y a sur le banc un beau garçon vivant qui respire la lumière, son torse qui se gonfle et s'anime, ses mains toutes gorgées de sang, et il rit comme moi quand la pluie brusquement tombe en masse dans les arbres, nous sortons des jardins du même pas parallèle, toutes les fontaines débordent et ma peau emportée - il y a dans la rue une tendresse, une dureté, une beauté qui me sauve, sans cesse, la seule réalité. avant - après
mardi 13 juin 2006 |