l'immédiate
journal d'O.

 

ça revient comme le rêve de quelqu'un d'autre : au corps de femme de la montagne la maison accrochée et l'espace de tes bras, c'était il y a presque un an et une éternité, je relisais L'idiot dans une vieille traduction, une des toutes premières traductions, balbutiante, hasardeuse, début du XXème siècle déjà fané et fade, ce pauvre Prince empesé du vocabulaire le plus richement et lourdement français qui soit, ça me faisait rire tellement je t'en lisais des bouts et tes yeux étaient là, très proches, coupés comme pour faire mal, tes yeux de danger public et ta peau et ta voix - dans la maison froide à l'aube j'ai mis mes mains dans la cendre de la grande cheminée et puis dans l'herbe trop vive du jardin suspendu, j'ai couru, sur cette espèce de garrigue au goût de carte postale j'avais les bras griffés et ton ventre à mon ventre, le ciel me surprenait, il me battait au sprint sur la ligne d'horizon et c'est vrai, j'ai rien dit, rien remis dans les mots, j'ai rien avoué du basculement fou dans la joie, c'est trop tard maintenant, démantelé et perdu, tu ne sauras jamais comme ça vivait dans ma peau, le simple fait de respirer, avec toi.


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mercredi 14 février 2007

Böcklin : Ulysse et Calypso (1883)