l'immédiate
journal d'O.

 

 

la nuit, sur la pointe des pieds pour toucher ta bouche dans une rue froide. il faut que tu sois fier, il faut que tu voies loin, il faut la joie et plus - c'est aussi pour moi une raison de me donner, la plus forte. tu me transformes de dessous la peau, sans doute tu n'en sais rien, et jusque dans la jouissance je dis : c'est parce que tu me laisses de la marge. j'ai très peu l'habitude des lendemains, les retrouvailles restent un rêve à vivre si je tiens le coup - j'aime te croiser encore et que ce soit infiniment dans ma peau et la tienne le lieu d'une collision. je descends dans la nuit et ma chair se déchire, lentement, sûrement, l'éreintement à ton oeil et ta voix, emmêlés, pour glisser tout le long d'un mur et retenir mon souffle. c'est une folie, c'est un vertige, c'est inconnu par delà la masse des fantômes qui t'entourent, c'est toujours dangereux, toujours la première fois. écoute, je suis un animal, une enfant, une énigme à moi-même que tu étales d'un coup, en splendeur, je suis faite pour l'amour et l'errance, les nuits courtes, trop près du bord, la vie très peu mais je fais des efforts, autant que possible. quelquefois (souvent) tout m'effondre, rien ne me suffit, et seul ce qui m'étreint m'emmène, il me faut sans fatigue l'abrasion insensé du corps et du langage, l'usure, le saisissement - tu es cela aussi, et la douceur ; choses inutiles, choses nécessaires, ta peau, ton rire, les journaux au matin et la très saine colère du monde, la façon dont entière je m'étends liquide et désirante quand tu t'approches à peine - mais qu'est-ce que tu vois quand tu t'approches, la nuque solide, donnée, qu'est-ce que tu vois je ne sais pas - tu me réconcilies, toute peau et perception, le sentiment d'être vivante pour entrer dans tes bras.


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samedi 24 mars 2007