l'immédiate
journal d'O.

 

 

son nom je ne sais pas, son visage change, quelquefois gris les yeux, ombrés, défaits, quelquefois ce sont les mains que tout de suite je reconnais, une certaine qualité physique, une densité, la matière même du rêve et le silence qui l'entoure - toujours changeant et toujours il revient, grand, souple, fin comme une fille, c'est dans l'eau du bain quand je passais encore dessous le fil de la surface que j'ai trouvé en moi - fragments, bris de nuit, déchirures - les traces de son passage, les traces sombres, lit d'autoroute, fenêtres ouvertes et battantes dans la nuit, sa bouche rouge, les traces infimes, l'illusion, le grand masque qu'est-ce que ça peut faire le doute au jour levé, le doute plâtré du réel qui refuse toute démission, il était là cette nuit, il reste dans mes gestes, mon avancée très lente dans le filtre des rues froides, il était là heureux, silencieux, sans pareil, il avait tes baisers, la marque des errants, cette désinvolture splendide et tranquille de l'allure sur la brèche, la pluie, la grande vague morcelée - il les tient, il me garde - mon beau garçon aux cheveux noirs mon image et mon double, mon danger idéal, tout ce que j'aspire à être et à aimer encore, encore quand je m'effondre il surgit comme au détour d'une promenade sur la crête, il rit comme si la nuit ne devait pas l'effacer.


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vendredi 30 mars 2007