| lundi 3 décembre 2001 les bateaux-(l)ivres de nova scotia je m'endors tard, avec l'aube. j'ai lu toute la nuit, parlé au téléphone, mangé du chocolat dans un emballage rouge, j'ai fait cuire des pommes avec du sucre et de la cannelle, j'ai écrit quelques lettres, j'ai lu toute la nuit, et à la fin j'ai pleuré. les bateaux de nova scotia. je dis à X que je veux m'enfermer dans une chambre pendant trois mois et ne faire que ça, ce que je fais de mes nuits, lire, écrire, parler toute seule, rire un peu et pleurer quelques fois, je lui dis que je veux faire ça, lire et lire encore jusqu'à me confondre dans le rêve, je lui dis que je veux m'enfermer dans une chambre, dans un phare, m'enfermer et ne voir personne enfin il faudra quand même qu'il vienne me fournir en chocolat. |
| les bateaux ivres de nova scotia. tout doucement je
pars à la dérive, je laisse tout voguer au loin, les flots de furie infinie, le pâle
vague à l'âme du matin. tout doucement je m'insularise, l'impression de ne plus vivre
vraiment que par sélection, je veux dire, je n'ai pas de temps à perdre sur des choses
qui ne m'intéressent pas, je coupe les ponts, je me détache, je m'en vais voguant, tout
est liquide tout est mouvant et déjà je suis loin, loin, une lumière minuscule sur la
mer. les bateaux-livres de nova scotia. je marche à petits pas dans la librairie, L sur les talons. nous remontons les rayons, lettre par lettre, auteur par auteur, il nous faut beaucoup de temps, beaucoup beaucoup de temps, il nous faut toucher les livres et effleurer les pages, soupeser le poids de papier comme un ultime hommage, Y nous a rejoint finalement il parle trop il fait des commentaires sur tout il m'énerve à un moment il brandit l'Ecume des Jours il prend un air intelligent, réfléchi, il me dit, oui mais moi tu vois là j'ai pas vraiment saisi le message, le message quoi, j'ai pas vraiment saisi le message. je lui dis, Y mon ami, il y a des gens pour qui certains livres devraient être interdits. |