breathing
under water... (un journal online) |
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dimanche 10 février 2002 le soir, dans la maison chaude. j'écoute gainsbourg, histoire de melody nelson. je feuillète des livres, du bout des doigts. baudelaire, wilde, lord byron. je descends, je m'allonge sur le tapis avec mon chat, je regarde la peau douce. françoise dorléac très triste à reims et qui sait que quoi qu'il fasse, lachenay la laisse hors d'une vie à laquelle elle n'appartient pas. S me dit que je devrais faire une petite fête pour mon anniversaire, je dis d'accord, mais chez moi, dans deux semaines, sept invités, une nappe blanche et beaucoup d'alcool. je pense à M, sans savoir vraiment pourquoi, aux vagues bleues sur les plages de Tolo (été 96). ma soeur ouvre un assortiment de cacahouètes qu'elle verse dans un bol, et entreprend de les trier une par une pour mettre de côté les noix de cajou. elle parle de son prof de français avec méchanceté, un type qui a enseigné à saint-cyr et qui leur fait étudier ses articles pour le monde littéraire certes, mais un type qui leur montre les films de Lynch aussi, alors bon hein lui dis-je, tu comprends, il ne peut pas être foncièrement mauvais. elle hausse les épaules : toi, de toute façon, tu n'aimes que les gens qui n'aiment pas les autres. |
je ne réponds pas. je pense à M, les vagues bleues sur les plages de Tolo. la nuit je sautais par dessus les balustrades de l'hôtel pour le rejoindre dans la mer. été 96. Mykonos, les bateaux balançants, églises orthodoxes rouges et bleues, le labyrinthe infini de la ville aux murs blancs. Sparte, Corinthe, Olympie, les vignes immenses d'un domaine quelconque où nous étions conviés à dîner, la mer était partout, nous l'emportions partout avec nous, jusqu'à l'intérieur des terres, parce qu'elle rejoignait le ciel et qu'elle nous enivrait, sous ce soleil terrible, insatiable et tragique, le soleil divin des secrets et des mythes. j'avais la peau hâlée et les cheveux très clairs. je voulais lire Platon dans le texte, rester debout sur le pont des bateaux dans la tempête, nager nue la nuit dans ses bras. quinze ans, seize peut être. je ne me rendais pas compte, comme j'ai su après, que tout s'inscrivait là sous ce soleil grec, - la folie, l'absolu, la mort avant la lettre. "une histoire tragique dans un décor merveilleux ? - une histoire merveilleuse dans un décor tragique." capri, le mépris, tout ça c'est le même soleil. camus dans les noces à tipasa ? le même soleil. la nuit quand je voudrais mourir et les heures rouges sur la tombe d'émilie ? le même soleil. minuit. tu n'es pas là. j'écris.
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