samedi 2 mars 2002
je ne veux pas qu'elle parte. mes parents sont rentrés, la maison reprend son visage sage, les verres lavés, rangés, les couvertures repliées sur le bord des lits, de petits bouts de papier d'arménie brûlent dans les cendriers. je ne veux pas qu'elle parte. elle a mis T dans le train et elle s'est mise dans mon lit. elle sent, dans l'air tout autour de moi, la peur et la fatigue comme laissées en suspend, elle voit, aussi, le geste trop rapide avec lequel je ramasse les dernières choses qui traînent, alors sans bruit elle vient, elle m'entoure de ses bras et elle me dit, tout doucement : tu peux pleurer si tu le veux, tu sais.
ça sera toujours difficile à dire, cette fille qui reste là, de loin en loin, et qui protège, avec sa voix, avec son corps, avec ses mains. ça sera toujours difficile, et personne n'y comprendra jamais rien. ça sera toujours ça pour moi : la présence, la chaleur, les lèvres ouvertes dans un baiser, allongée alanguie sur le lit très belle et souveraine, quand le monde dehors s'écroule et que je tombe avec, elle efface tout comme elle vient et je me laisse aller à la grande vague, la beauté, la vie pure tout contre elle, un oeil complice et qui surveille, la douceur de la mer, l'abandon, l'amour fou, - le soleil.
et quand elle part, envers et malgré moi,
il me reste toujours plus d'amour que de tristesse.
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