Et puis, -personne ne saurait dire d'où
cela est parti- il y eu comme une étincelle dans ce nuage
de particules vides en suspension dans le Temps et dans l'Air.
Juste une étincelle
Et soudainement il s'en est suivi une
déflagration intense et tout s'est enflammé avec
une incroyable violence. L'enthousiasme salvateur venait d'atomiser
le néant. Je venais soudain de... Comprendre.
Ce monde est absurde. On nous enseigne
des règles, on nous cloître dans la morale, et
lorsque cela ne suffit pas, on nous invente une espèce
d'instance supérieure qui nous promet une vie meilleure
si l'on est sage dans celle-ci. Et on ne nous donne pas le choix,
car on grandit avec cela, on se construit avec tous ces repères
de façon à ce que l'on ne puisse plus jamais,
jamais s'en défaire. C'est une pure domestication de
la bête Humaine. Dans ses premières années,
on apprend à l'Homme les bonnes manières, puis
s'il est 'chanceux' on le place dans des établissements
où on ne va pas cesser de lui enseigner ses ancêtres,
les règles, les modèles et la logique, enfin -encore
une fois s'il est 'chanceux'- il se verra offrir un travail
et avec encore un peu de chance il aura été correctement
conditionné pour y trouver sa vocation. Et pendant plus
de la moitié de son espérance de vie, l'Homme
va travailler pour pouvoir manger et dormir, l'Homme va manger
et dormir pour pouvoir travailler. Puis s'il lui reste quelque
argent, lorsqu'il ne sera plus productif, l'Homme sera cloisonné
dans une de ces maisons pour Humains-inutiles-en-passe-de-mourir.
Puis ce sera la Fin.
Ce monde est absurde parce que tout est
mis en oeuvre pour que nous focalisions sur des valeurs qui
nous ont été imposées, alors que les valeurs
plus Humaines sont mises de côté. Et pour peu qu'on
lui laisse le loisir de penser -oui, c'est dangereux de penser,
alors on fait en sorte de l'occuper, l'Homme, de lui donner
un travail, des responsabilités et des soucis-, la pensée
de l'Homme est endiguée. C'est un engrenage infernal
dont personne ne peut vraiment sortir sans se faire affaiblir
à l'eXtrême, jusqu'à en mourir d'eXclusion.
Il s'agit là vraiment de lui assurer sa survie en échange
de son aliénation. Et Personne, personne ne peut échapper
à cela, ni vous, ni Elle, ni moi.
Ce monde est absurde parce que même
en ayant conscience de cela, je reste prisonnier. parce que
j'ai été construit selon toutes ces valeurs contre
lesquelles je me révolte aujourd'hui. parce qu'il est
illusoire de pouvoir se défaire de tous ces fallacieux
repères. Parce que si je décidais de remonter
le courant, je ferais du sur-place, et je finirais comme tous
les autres, croqué par le Temps. On ne cesse de nous
enseigner la logique et ce monde est absurde
La plupart des Humains ne pensent pas
à cela, tout du moins pas de manière consciente.
Cela déchire, cela fait mal, et surtout cela est vain.
Alors le cerveau humain qui est eXtrêmement bien conçu
refoule cela dans les profondeurs du Ça. J'espère
ne jamais m'endormir, ne jamais oublier cela. Je suis condamné
à être écorché à vif par ce
duel qui fait rage dans les profondeurs de mon être. Mais
c'est un moindre mal. vraiment. parce que je pense que c'est
dans ce défi que s'exprime l'eXaltation de la Vie.
Mon père par exemple se complait
à vivre dans son décor de carton. Il obéit
très docilement aux règles, il s'épuise
dans son travail, à gagner de l'argent pour avoir l'illusion
d'être libre et peut-être heureux. Même s'il
sait parfois que tout cela est dénué de sens,
il n'a pas la moindre envie d'y réfléchir. Il
est juste bien. il se complait dans son eXistence. Oui, mais
papa ton eXistence est plate. La quasi-totalité du Temps,
tu laisses le monde et les règles et la morale décider
pour toi, alors que tu pourrais être libre d'être
un peu plus toi-même, de te mettre à la barre de
ton propre naVire et de t'accomplir. Quelques fois, j'ai juste
l'impression que tu n'es que l'ombre de toi-même, que
tu passes à côté de ta Vie, et que tu finiras
par mourir d'épuisement dans un travail auquel toi-même
tu ne crois même pas. Tu ne devrais savoir cela que trop
bien. Ton père est mort de çà. (
)
Ophélia tombe dans l'eXtrême
inverse.
(et moi je tombe de sommeil. Encore une fois, je vais me jouer
des règles du journal. Je continuerai le portrait d'Ophélia
demain
)
(19-11-2001 : Plus besoin de peindre Ophélia, puisqu'elle
est là. je lui rends les clés. a quelquepart...
- je disparais)
Pardon pour ce délire eXistentiel.
C'était juste moi aujourd'hui.
N.
Ah ! que la Vie est quotidienne...
Et, du plus vrai qu'on se souvienne,
Comme on fut piètre et sans génie... |
Jules Laforgue,
Les Complaintes, Complainte sur certains ennuis
|
Notre existence quotidienne est
un mauvais feuilleton par lequel
nous nous laissons envoûter. |
Michel Butor, Répertoire,
II
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