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... living under glass

(un journal online)

 

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23-09-01

plus que de raison

je dors peu, je rêve beaucoup. le matin, c'est la lumière très blanche qui me réveille, une lumière très blanche qui m'entre jusqu'au fond des prunelles. je dors peu, parce que je n'ai pas beaucoup de temps, parce que j'ai trop de livres à lire et d'histoires à écrire. je rêve beaucoup, parce que dans mes rêves tu n'es jamais parti, tu ne partiras jamais. tu avais eu cette même phrase que L un jour, tu avais dit, "je fais des rêves merveilleux". je n'avais pas compris. je te connaissais à peine. pour moi le sommeil était un gouffre sans fond, une petite mort. un oubli très blanc. il y avait tous ces cauchemars où j'étais seule et défaite, tous ces cauchemars de mers immenses et d'îles désertes. je prenais des tas de médicaments, j'étais toujours tentée d'en prendre trop. le monde est un manège qui donne le tournis.

ces jours-ci, je dors peu, je rêve beaucoup. des rêves très doux, et qui parlent de toi. merveilleux.

une lettre de A, pour me revoir. incandescence du coeur. les mains qui tremblent, un peu. tu me veux encore ? pardon, lapsus. tu m'en veux encore ? faudrait peut être arrêter de changer d'interlocuteur comme ça, mademoiselle O, parce que plus personne n'y comprend rien. ça tombe bien, j'ai les mains qui tremblent, je vous dis. je n'ai pas revu A depuis... ... j'avais adoré ce mois de juin, très doux, ensoleillé. je passais mon bac de français. je n'avais lu aucune des oeuvres au programme. le jour de l'épreuve, L était là. A était là aussi. moi, j'étais folle, j'étais debout sur ma chaise pour lire victor hugo, je crachais sur napoléon le petit avec toute l'énergie du désespoir. "le dogue Liberté gronde !" ça murmurait dans les couloirs. je m'en fichais. je rayonnais. je savais qu'il m'aimait comme un fou, et j'avais tous les droits. l'éternel orgueil des amoureux... après, dans l'été, le fondu des après-midi lourdes de chaleur, les fêtes, les musiques, je dansais dans le bleu des lumières, je volais de bras en bras et lui s'en mordait les doigts. je l'aimais, pourtant, d'un amour secret, incandescent. on chuchotait dans nos dos. lui le chevalier transi, moi la princesse insoumise. ils ne savaient pas, car ils ne savent rien, ces autres qui font le pied de grue dans leur propre monde, ces autres qui font l'entourage, à peine le décor, ils ne savaient pas qu'à chaque nuit tombée j'allais me noyer dans ses bras.

et puis je suis partie en vacances. et puis je suis revenue pour trouver émilie enterrée sous une plaque qui ne veut rien dire. et puis j'ai su, aussi, que rien ne serait plus jamais comme avant. le monde est un manège qui donne le tournis...

je ne l'ai pas revu depuis. ou alors, de très loin. il venait me voir et je ne répondais pas. il m'apportait des lettres et je ne les ouvrais pas. je suis une idiote. je me croyais jeune et belle et virevoltante et j'ai agi comme une idiote. tu m'en veux encore, dis ? tu avais les yeux très noirs et je mourais de les embrasser mais pour rien au monde je n'aurai osé l'avouer. le temps a passé. le temps a tout dévasté. il y a cette lettre très blanche sur mon lit et je crois bien que je vais dire oui.

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mais comme a disparu la belle saison
le vent ne souffle plus que par comparaison...
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