l'immédiate

journal d'O.

samedi 24 août 2002

je glisse de bras en bras. c'est une soirée douce chez JL, les gens qui vont, qui rient, qui viennent, dans la salle de bain entre filles on se raconte notre vie pour le plaisir d'en rire enfin, d'en rire protégée par les quatre murs de la salle de bain et puis l'expectative douce, légère, ambrée de la soirée. j'ai la tête qui tourne de tout ce monde qui rit, je m'échappe, disparais, j'ai soudain envie de pleurer de cette foule informe et puis on me rattrape au détour d'un piano, on me rejoint, on me sourit. je glisse de bras en bras. ils me rattrapent tous tour à tour comme des trapézistes sur le bord du filet. la tristesse, ils la confondent d'un rire ou d'une caresse. ils en font des cocottes en papier, des confetti. ils ne me jugent pas. ils me font danser. ils trinquent à ma santé. ce sont de toutes petites choses. je les regarde tous, je les regarde parler, je m'étonne de cet amour qu'ils ont pour moi qui ne leur rend jamais. moi fantasque futile idiote et mes grandes idées à la noix sur l'amitié factice des cours de lycée, le fantasme avorté du groupe, moi et ma solitude mélancolique, insupportable. ils ne m'en veulent jamais. ils ont chacun leur sourire, leur mot juste, leur manière d'être là sans le faire remarquer. ils ne demandent rien en retour. ils s'en foutent. ils rient. ils ont vingt ans pour de vrai. ils me rattrapent tout en souplesse juste sur bord du vide et ils me ramènent dans la danse, sans ciller. je glisse de bras en bras, je peux fermer les yeux, enfin, et me laisser aller. ils sont là. ils ne me demandent pas mon avis. ils ne sont pas décidés à me laisser tomber. quand je suis triste que je voudrais mourir tout simplement disparaître je pense à ça, à cette chance là, fabuleuse et étrange, la chance d'avoir des amis malgré soi.

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