l'immédiate

journal d'O.

samedi 9 novembre 2002

au lac Pavin l'hiver l'eau était noire et profonde comme la mer. les arbres se balançaient doucement. une brume étrange flottait sur le cratère. l'eau semblait parfois bouillonner par endroits. je m'accrochais à la manche de mon père. il me guidait dans la brume et la neige. on parlait à voix basse. le froid et le brouillard étoffaient nos mouvements d'une ombre blanche et silencieuse et toujours je me voyais glisser, glisser tout doucement, du bord haut du cratère jusqu'au fond du volcan. je suivais la voix et les pas de mon père. j'avais besoin qu'il me parle, qu'il me parle sans cesse, que rien ne vienne rompre le fil blanc de sa voix. je pensais aux fantômes, les corps avalés par l'eau noire, tous les rêves engloutis. je croyais voir sous l'eau, la mince pellicule de glace brillante comme un miroir sans tain, je croyais voir une ville, des tours aux bords crénelés, des chevaux, des enfants, des armées. j'imaginais toujours qu'à un moment, un moment forcément une main allait jaillir, un cheval harnaché, un cavalier noir qui m'emmènerait à l'eau. et puis rien ne venait. j'en étais transie de peur, et puis presque déçue.

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