l'immédiate

journal d'O.

jeudi 21 novembre 2002

les heures de longue tristesse je m'absorbe dans mes propres gestes, longtemps très longtemps je passe et je repasse la brosse dans mes cheveux, le thé infuse jusqu'à devenir rouge, j'ouvre des livres au hasard et parfois c'est le bon, ce matin c'était une phrase de Sylvia Plath qui m'a tirée de ma torpeur, quelle phrase déjà je ne sais plus et puis quelle importance, ce qu'il me fallait plus que tout c'était le sentiment de puissance que quelques mots donnent parfois comme surgis de nulle part et pourtant visant juste, la résonnance parfaite à l'écho étrange d'une demande que l'on n'aurait pas tant su formuler si elle avait été réfléchie, une phrase de la tristesse de fond d'une autre dont on peut faire tremplin, et peut être qu'en écrivant ici je me veux un possible tremplin également, être là et rien que là pour qui le voudra bien, dans le moment.

sur cette phrase, plus encore sur l'imaginaire de cette phrase j'ai bâti doucement tout le reste de la journée, je suis sortie marcher dans la ville, cheveux tirés en arrière, faisant claquer l'asphalte sous les talons de mes chaussures vernies, ces chaussures très kitsch et que je n'avais vraiment achetées que parce qu'alors que je les essayais en riant, une dame d'une soixantaine d'années qui me regardait avec beaucoup d'attention était venue me dire tout doucement, sur le ton du souvenir ému et de la confidence : j'avais très exactement les mêmes à votre âge.

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