l'immédiate
journal d'O.

 

 

les yeux bleus abandon

06.12.03

les yeux bleus abandon - j'écris cela à cause de Modigliani - les yeux immenses, sans fond, découpés au ciseau dans un morceau de ciel et jetés à la face, volés à la nuit pâle ou à l'eau des piscines - au collège, amoureuse, de rage j'appelais ça les yeux bleu-chlorine. je me souviens de T, iris tendres dans la nuit, trop pâles pour être compris, je me souviens encore - la laque rouge de la voiture ruisselante sous la pluie, ses deux mains à ma nuque, la surprise d'un baiser. les yeux bleus abandon - il y avait ce type, en septembre, à la gare d'austerlitz, je tremblais, je flottais, je trouvais ça fabuleux, je voulais écrire une petite annonce, la publier dans Libé - que les journaux une fois au moins servent à quelque chose - les yeux bleus, l'abandon - il y avait l'homme brun de la bibliothèque, Raphaël 1 et 2 le 3 aussi je crois et les yeux de Kafka qui étaient noirs très noirs mais je ne voulais pas, les yeux clairs et profonds comme des fontaines glacées, mon refuge de tout temps, arraché à la foule, connu loin du dedans. j'embrassais vos paupières, vos yeux de pierre et d'eau, les mystères qu'ils emmènent sous vos cils toutes les nuits, les rêves qui vous habitent, est-ce que j'en fais partie ? je voulais être partout - partout dans votre regard - filigrane sur le monde qui vous prend, qui vous plaît, en miroir dans le bleu comme à l'eau des marines, voguante, vagabondante, à vous seul amarrée.

 

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