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l'immédiate
journal d'O. rouge et or pour l'été |
lundi 21 juillet 2003 la grêle tombait en rideau noir sur la route et puis partout cassait les herbes, les tuiles, les tiges dorées des blés. je n'en revenais pas de la fraîcheur des sous-bois. derrière les volets rouges de la maison l'enfance restait intacte. je retrouvais mes gestes. il y avait quelque chose en moi d'endormi à la vie dans le fort de l'été qui s'éveillait doucement, qui reprenait l'espace. je suis descendue au jardin sous la pluie. les prunes étaient vertes et acides, presque bleues à la lune. le rêve et puis l'angoisse s'estompaient dans la brume. j'avais un mal fou à marcher, à faire bouger mes mains, à respirer vraiment. je me suis rendue compte soudain combien ces deux dernières semaines en Avignon m'avaient été violentes. on vivait dans l'urgence, politique et sociale, culturelle, amoureuse, on vivait dans la fulgurance éclatante et dangereuse de la lumière, de la chaleur, des nuits qui ne tombent jamais noires, du langage éclaté, du désir tout-puissant. un moment historique criait-on aux forums, un moment qui s'en venait trop vite et puis trop violemment pour que l'on puisse jamais s'en forger une idée, qui nous brûlait le coeur le soir sous les arcades, qu'à vouloir approcher on ne pouvait même plus comprendre, et à peine formuler. je me sentais très jeune, sans repères, ballottée. le soir dans son regard, pourtant, j'avançais fière enfin et brûlante comme jamais. |
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