l'immédiate
journal d'O.

 

 

le tatouage

05.11.03

j'ai trente, quarante, cinquante ans de retard sur le monde - les films que j'aime, les robes que je porte, ma manière de parler, de vivre, de marcher - Jérôme disait : tu marches comme Fanny Ardant dans Vivement Dimanche ! - ce ne sont pas les choses d'aujourd'hui, pas les repères de ma génération, j'ai raté les cours du mardi de Deleuze, j'ai raté les soirs à la Cinémathèque, les concerts de Ferré au TLP, les cris du coeur pour l'Algérie, pour le Vietnam, pour le Chili, je vis dans les voyages de mes parents, mes grands-parents, leurs photos, leurs souvenirs, les affiches de cinéma dans le bureau de mon père, tous les combats qu'ils ont menés, j'avance dans des désirs lointains et dépassés, la voix de Reggiani, les chansons de Cohen ou bien de Boris Vian, Barbara, le Velvet, masculin/féminin ou bien la règle du jeu, et toujours le souvenir de la guerre sur le sol défoncé m'explose le coeur sur la route de Belgique, je vis chaque jour à vivre dans la mémoire profonde d'un siècle, d'un pays, cette langue même que je parle sur des phrasés passés, Maria Schneider dans le Dernier Tango, je suis une enfant du vingtième siècle et je ne m'en sortirai pas, l'histoire me tient serrée, elle m'a tatoué la peau.

 

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