qui
sait, à la nuit en nasse, si je ne me prendrai pas moi-même
au piège à l'intérieur de ma propre peau -
toujours languide, un peu violente, avec cet air dangereux de mer
montante
- tous les mots se cassent comme du verre - et c'est très
bien - dans la nuit j'écoute des disques - dans la nuit
je marche loin sur la neige - dans la nuit je téléphone
mais d'abord je remets du rouge à lèvres - j'aurai
bientôt vingt-cinq ans je n'aurais jamais cru que cela viendrait
un jour - vingt-cinq ans et comme par hasard (un peu) mes cheveux
coupés
foncés
ma peau pâle
l'arc un peu dur de mon visage je le lis comme de miroir sur les
photos de ma mère au même âge, des photos légèrement
abîmées d'avoir été passées de
mains en mains ou laissées offertes à la lumière,
des photos d'hiver blanc, grand froid rare, sourires heureux, et
ma mère debout dans mes presque vingt-cinq ans tient tout
serré contre son sein une enfant qui quelques fois me manque
si profondément.