l'immédiate
journal d'O.
Paris

 

 

plaie merveilleuse

22.11.05

l'éclatement, la dissémination. je sens la fêlure qui appelle. la nuit sur le chemin de crête du rêve comme sur la faille secrète du coeur - cet été-là en Turquie la terre avait promis de trembler et puis l'île des Princes s'était vidée d'un coup - je marchais dans les rues sous la main merveilleuse des arcades byzantines, des lierres et des fantômes, entière dans la nuit, entière dans la mer, au piège des grandes algues glissantes qui brillaient dans l'eau noire, ça serrait aux chevilles, ça tenait par la gorge, le rêve pareillement et descendant dans la peau jusqu'au chant du muezzin - le jour la lumière était celle, sublime, de l'Antiquité, et puis la mer chantait, bleue, brillante, bienheureuse - la nuit brusquement les grandes bougainvillées pliaient un peu la nuque, je passais dans la fente, les sombres rochers violents, l'odeur forte des chevaux, au sommet de la colline l'ancien monastère grec tour à tour phare et refuge et orphelinat et bordel, touffeur folle de la nuit, limon noir des criques acérées, pour battre la peau dans la vague, pour amener en elle la sève et puis l'épine et l'ivresse des massifs - la naissance du jeune homme aux cheveux noirs - la première secousse de la faille intérieure - ce soir encore je sais les mondes marées qui vont et viennent en moi, il faudrait les écrire les sortir de la peau peut être mais je ne peux pas - tout gronde, tout résonne, il me semble à chaque instant que je vais surgir de ma propre chair - je ne peux pas.

 

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