l'immédiate
journal d'O.

 

H et O ont des révélations : on devrait peut être pas coucher dès le premier soir dit H, on devrait peut être regarder la télé plus souvent dis-je - voilà pour les sublimes élans philosophiques du jour, et errant dans les librairies nous sommes insortables vraiment, snobant les pâtés de tête de gondole, sauvant Sylvia Plath de la masse des machins de science-fiction qui constituent la majorité du rayon des livres en anglais pour la confier, la douce violente de sous la peau, à la compagnie du grand corps écrit d'Alejandra Pizarnic, nom de dieu tu as vu le rayon poésie ? j'ai vu oui les yeux sombres et tranquilles le long des rayonnages, il touche le bois, les livres, il fait l'épreuve du feu Artaud sa pupille s'est vidée d'un coup, et son cou est très blanc, l'intérieur de ses mains l'affluence bleue liquide c'est ce que j'appelle un très beau coup de revolver de corail - il y a une espèce de foule du genre à mettre du lait dans son thé qui fouine l'attention d'un auteur quelconque, il y a un manuel de grec moderne qui me saute littéralement dans les mains, il y a une grande oie alourdie de bijoux qui partage l'organisation de son séminaire en Sorbonne avec tout le monde et qui s'écrie d'un coup : et toujours pas de nouvelles des seiziémistes ? voilà donc le grand drame de cette planète désarticulée - l'absence notoire de seiziémistes - et je voudrais que Betty surgisse encore avec ses yeux de folle heureuse et accomplie quand le Luco s'endort en pivoines blanches et lauriers-roses - Paris, Paris, Paris que reste-t-il encore à adorer dans cette ville que je ne comprends plus que par échardes aiguës ? le soir sur les bords du canal de l'Ourcq, robes froissées et glou-glou de petit rouge, L et H et la nuit alanguies.

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samedi 24 juin 2006