l'immédiate
dans les cafés avec H, les dernières heures parisiennes et l'impossibilité de se quitter je regarde les américaines très fières dans leur mauvais français les types
accoudés au comptoir qui s'engueulent
avec joie
un jour d'hiver j'ai bu un truc ici avec JB qui me racontait qu'il avait été à l'école maternelle dans une école shintoïste de Tokyo, on l'avait cherchée sur un plan que j'avais dans ma poche un autre jour encore en terrasse avec L un crétin local nous avait abordées en s'exclamant : l'amour surréaliste a encore frappé ! il distribuait des cartes de visite manufacturées qui promettaient tout Proust et tout Breton sous le couvert d'un pseudonyme faussement libertin et radicalement ridicule, je me souvenais l'avoir vu faire sa réclame grotesque à la sortie des hypokhâgnes, le moins qu'on puisse dire c'est que ce jour-là, dans le soleil limpide, je lui avais comme qui dirait taillé un short une autre
fois encore j'avais trouvé sur la table, c'était un jour à parler japonais et j'aimais bien quand Jerome m'emmenait manger des omelettes géantes ou des amaryllis dans la tristesse de l'hiver, deux ans plus tard Sanae-san m'avait rejoint à cette même table ouverte contre la vitre où un type hurle maintenant au téléphone avec cet air follement amusant qu'adoptent les gens lorsqu'ils s'emportent pour le plaisir premier d'être entendus du plus grand nombre : "oui tu comprends dit-il elle était toujours très sexy, elle ne mettait jamais de culotte, juste comme j'aime, et puis elle aimait se faire caresser, elle aimait ça !" puisque le zouave parle pour être écouté je note chacun des mots qu'il profère, édifiant tellement je mords le bout de mon stylo pour ne pas rire quand il s'exclame :"pourtant tu vois c'est la seule de toutes les filles que j'ai connues qui n'a pas voulu aller aux Chandelles... c'est fou cette nouvelle génération à qui il faut toujours tout apprendre !" la cinquantaine hideuse, comme il regarde H et comme il me regarde, sublime specimen du mâle dominateur à la con, réac autoritaire et qui se croit licencieux, aveugle à tout ce qui ne sert pas sa jouissance immédiate et ses fantasmes psychorigides, tout un poème donc et j'en ferais volontiers des confetti H me dit : tu sais ce qui serait drôle, ce serait qu'à la fin de la conversation, après avoir glosé une heure sur les filles asservies, les putains à promener en laisse en public et l'inadmissible frilosité des gamines pré-pubères on l'entende dire : "allez, au revoir Maman ! ".
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dimanche 25 juin 2006 |