l'immédiate
journal d'O.

 

 

idiote, libérée par une paire de ballerines chinoises (plates) et un vieux pull d'une couleur que je n'ai jamais portée - retranchée toujours dans l'armure de mon noir - et qu'Aurélia m'a donné en riant pour me faire respirer. idiote, oui, de s'épanouir soudain et sourire à la foule parce que de la peau, terriblement, quelque chose s'est rompu, le flot gagne en ampleur. idiote, il m'aura fallu tant de temps pour accepter en moi ces morceaux sans apprêts, ces yeux sans maquillage, ce goût que l'on dit masculin pour l'esclandre, la vitesse, l'élan à entraîner sous une bannière flottante toute une meute violente et que j'aime diriger. je ne sais pas dire encore ce qui se passe. un moment dans l'été quelque chose a changé. est-ce que c'est toi si fou et ta belle insolence, toi qui ne fais aucune concession à mon orgueil et mes erreurs, est-ce que c'est la longue lutte victorieuse, à cheval sur des plaines et se battant comme seuls les hommes en ont le droit, des Mademoiselle de Maupin, des Haute-Claire et des Orlando si profondément avancées en moi, est-ce que c'est H un beau soir de pleine lune et qui me dit la plaie c'est que l'homme est neutre c'est la femme qui est marquée par le genre, est-ce que c'est Stéphanie retrouvée dans la nuit et dont toute la peau murmure : le regard n'est rien ? je sais que la prison c'est aussi la peau folle, c'est cette peau langoureuse d'un rien, balançante comme la pluie et qui attire en foudre des jugements des désirs qui me transpercent pareils - la prison c'est de se définir de par sa seule perception (trop forte, trop fluide, en tourments) et toujours s'en laisser dépasser, s'en laisser entraîner ; je n'ai rien à prouver, je n'ai rien à atteindre, à attendre, à être ou à paraître - à peine et si intensément je suis là et j'en jouis.

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mercredi 6 septembre 2006