l'immédiate
M quand il traverse une
pièce (étroite soudain) et qu'il emmène tout avec
lui : je me souviens de morceaux oubliés - mes mains, ma nuque,
ce qui va dans ma bouche liquide comme l'air et la nuit froide.
j'admire les filles qui battent de l'aile autour de lui : fines,
intriguantes, avec des yeux d'eau ou de miroir flottant, elles rient
doucement dans la lumière tamisée et les plis des
rideaux, l'une a apporté une orchidée qu'elle arrange sur
la table, l'autre fume à la fenêtre en croisant les
chevilles. elles me rappellent une longue promenade lointaine dans des
tableaux de Moreau : bleu tendre et camaïeux, avec le tissu fin
d'une tunique, une frange italienne et des boucles d'oreilles en argent.
elles me rappellent tant de choses que j'aime et que j'ai aimé
donner à M : les livres de Huysmans, le passage Verdeau,
les
visages statufiés des peintures d'Odilon Redon ou de Fernand
Khnopff, la beauté des yeux verts qu'adorait Jean Lorrain.
souples elles décrivent des cercles autour de la nuit et dans le
feutre épais qui recouvre nos membres. comment leur dire
dès lors : attention, ce
garçon est comme moi, il n'a plus de coeur depuis longtemps ?
elles savent, elles déchirent le coin rouge de leur lèvre
pour
l'image d'une blessure de ses yeux en couteau, rien ne leur va si bien
et peut
être ce sont elles qui me protègent, doucement, ce sont
elles qui veillent quand elles murmurent : qu'importe ton coeur, ta
peau
palpite tellement. vendredi 2 novembre 2007
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