l'immédiate
- je t'attendais dans ce café qui est mon repaire et où j'ai tant attendu déjà de corps et d'illusions, je t'attendais tranquille, j'ai dit : ah non c'est les couples qui vont au cinéma ! et j'en mourais d'envie ; comme je fais au théâtre tu t'assois tout au bord, faut-il que l'on soit l'un et l'autre toujours dans la sûreté de la fuite, et faut-il que j'ai tant besoin de toi ? j'étais folle dans la rue d'être vivante avec toi et brûlante d'un désir qui se tient dans le réel. pourtant cette chose étrange : tous les soirs de nos rencontres depuis le premier soir nous sommes rentrés ensemble jusque dans la peau profonde et voilà les néons, l'adieu maladroit dans la chaleur et le fracas du métro, je pleure sur le quai parce que je suis faite de symboles et de superstitions, je pleure et qu'importe les raisons évidentes la logique les choses simples et naturelles (on me dit) qui s'appellent la fatigue, le travail, les responsabilités etc je pleure parce que jamais je ne saurai accepter ce qui entrave ma joie et corrompt ma confiance. /// maintenant la ligne est bloquée et l'attente me déchire. /// la foule s'ammoncelle. /// la dame en manteau vert me sourit, il y a un enfant qui dort dans les bras d'une vieille dame et deux hommes parlent lentement, en anglais, d'un jardin de tournesols sur le toit d'un aéroport lointain où j'ai dormi un jour, c'était il y a deux ans et une éternité. /// en vérité : attachée à toi comme je suis il est tout à fait étonnant que je ne t'aie pas encore sacrifié pour une fuite lointaine et bien plus sûre de beauté absolue que n'importe quelle histoire de baise, comme on sait, toujours vouée à une fin sordide, décevante, misérable, la liste est sans pareille. souvent tout me fait peur : ce que je suis et que je ne comprends pas, ce que je ne serai pas, et la crainte d'être usée, usée à rien par des amours de haute surface sans relâche répétés. tout le temps tout me fait peur, d'être avec toi et de ne pas l'être, d'être à toi et trop et pas assez, d'être et de m'effacer, jusqu'au grondement soudain du métro quand il entre enfin dans la station blafarde, et la bande blanche brillante , cette bande blanche frontière du raisonnable et du sans recours, je la regarde toujours comme la marque d'un seuil, je suis et c'est ainsi excessive, déraisonnée, abîmée du réel, je regarde la bande blanche et tout le temps je me demande : les gens qui la passent dans le vide passent-ils au dessus de la peur ?
avant -
après 25 septembre 2007
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