breathing under water...
(le journal d'ophélia) |
mercredi 5 juin 2002 cet orage somptueux qui m'emporte avec lui. le vent plie la rue sous son souffle et puis mon grand parapluie rouge. je traverse la ville sur une vague. j'aime ce sentiment très pernicieux de fatigue et de froid, la douceur de la fièvre, le vertige, l'ivresse et puis l'oubli, le long glissement dans la maladie. le midi, j'emmène D déjeuner dans un café près du Luxembourg et le serveur qui ne m'a jamais vue venir ici qu'avec X me fait presque les gros yeux. je prends du thé à la bergamotte très chaud avec du sucre et des cachets d'aspirine. j'ai la peau très blanche et puis la bouche très rouge comme un trou indécent ou bien une blessure. sous les parapluies verts des arbres du Luxembourg, D marche en avant et je marche sur ses traces, à l'abri de la pluie et du vent je déguste feuille par feuille un 2000 feuilles praliné de chez pierre hermé. rue de l'odéon j'achète des livres d'occasion parce que quelqu'un les a annotés dans la marge au crayon violet avec beaucoup de grâce et d'attention. je crois que je pourrais tomber amoureuse d'une écriture comme ça, d'un désir de crayonner son livre de tout le flot de pensées que sa lecture entraîne, je crois que je pourrais tomber amoureuse de cette main, de ce visage que je ne connais pas, deux initiales penchées sur le rebord de la première page, tomber amoureuse à l'aveuglette, infiniment, pour la grâce d'un mot ou d'un moment, je crois que je fais ça tout le temps. |
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