breathing under water...

(le journal d'ophélia)

mercredi 22 mai 2002

- ciel, dis-je, une fille dans mon lit. la porte s'est ouverte, tout à l'heure, un rai de lumière très fine dans le silence de la nuit (il doit bien être 15 heures), et puis le bruit mat de son sac qu'elle dépose sur la table, ses chaussures qu'elle retire (je le sais) comme le font les enfants, en arrêtant les orteils droits sur le talon gauche et puis inversement, les chevilles qui s'emmêlent sous sa jupe qui tombe dans un froissement, le drap qui se soulève son corps souple et doux la fraîcheur de sa joue et son parfum terrible, je dis : un parfum d'ambre et de musc blanc.

c'est impossible, d'être douce comme ça d'être belle infiniment, de rire et de marcher comme elle, et ses grands gestes lents, d'avoir cette fraîcheur, cette intelligence du monde, du coeur, enfin, vraiment, c'est impossible d'être comme ça d'exister pour de vrai dans ma vie à moi et avec tant d'amour. moi qui ne pardonne rien, qui me fâche d'un rien, un col mal mis un pli mal fait un mot mal dit moi qui ne pardonne rien à elle je pardonne tout, ces crétins qu'elle fréquente ces trucs moches qu'elle adore et même ce type qu'elle aime, c'est impossible, vraiment, d'être comme elle est, un rêve-réalité, un personnage de roman, sa façon bien à elle de jouer avec les gens, cette liberté folle qu'elle me donne parce qu'elle m'aime, parce qu'elle me protège, parce que lorsque l'on s'en va de front dans les grandes rues on dirait que la ville s'écarte sur notre passage, que tout peut arriver que l'on gagnera toujours, que la nuit qui tombe enfin elle-même nous accompagne, nous entoure de ses bras comme un corps en amour.

plus tard, quand son médecin (chez qui j'ai couru, persuadée que j'allais mourir au moindre mal de gorge) me regarde et me dit : vous êtes sa soeur ? vous vous ressemblez tellement, je lui dis : alors vous, vous savez comment faire un compliment.

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