jeudi 28 mars 2002
quand je suis triste, c'est que j'ai froid à l'intérieur. pourtant j'ai tant aimé, tout à l'heure, le piano mal accordé au fond du café, la promenade dans les rues froides, avec la neige qui craque, les maisons aux mille escaliers, de temps en temps l'envie de rire, pour rien, parce que je suis bien, que dans mon innocence superbe je m'en irai toujours dans la vie avec la grâce des vivants, l'assurance folle des amours à venir, parce que dans mon innocence je serai toujours douce et liquide et polie comme un caillou par la mer, le ressac éternel des vagues et du temps, je veux dire : l'éternité à fleur de peau. quand je suis triste c'est que j'ai froid à l'intérieur, soudain. c'est que l'espace d'un moment, j'ai perdu la confiance, l'orgueil, et la patience, l'espace d'un moment j'ai eu peur et j'ai eu froid de l'intérieur de ne plus être tout contre toi. tout à l'heure encore j'irai marcher dans la neige et les enfants joueront le long des jardins ils feront de gros bonhommes de neige avec leurs doigts tout rouges, le vieux monsieur du bas me fera un petit signe de la main, j'aurai envie de me laisser aller à la vie, de dire : rien d'autre n'arrive que ce qui est désiré, terriblement. les mots et l'envol du coeur et le désir, c'est la même chose. c'est comme une robe que je porte ou une fleur rouge dans les cheveux. la vie arrive au fur et à mesure que je l'écris. et si j'écris l'histoire du jeune homme aux cheveux noirs, est-ce qu'il m'attendra quelque part ?
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