breathing under water...

... living under glass

(un journal online)

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mardi 27 novembre 2001

prendre la mer

dimanche soir, dans le métro, toute seule debout au dessus des gens assis, ramassés sur leurs sièges. il y a de la place mais je reste là, droite, sage, un peu appuyée à la porte, toute seule, je reste un peu là, j'ai mal au coeur, j'ai mal au coeur de tous ces gens au regard fuyant, ramassés sur eux mêmes, à un moment un type se lève, les gens vont et viennent et s'affaissent aussitôt sur les strapontins, à un moment un type se lève il est debout à côté de moi il sent la pluie et la cigarette, il me regarde sans sourire mais il comprend, il comprend la dureté l'âpreté le vide terrible du moment, il me regarde encore puis il descend, et moi je reste là au milieu de la foule et je suis seule, seule comme jamais.

prendre la mer. fendre la mer. et mon phare, où est passé mon phare ? j'ai perdu les cartes. et le compas, et la boussole. ça n'est pas très grave, je ne savais pas m'en servir de toute façon. le soir dans mon lit toute seule j'ai un peu peur, j'ai le corps liquide, je flotte comme un grand lys, les marées inlassables lavent et relavent mon front, mes mains, mes jambes, tout le long de la nuit. à un moment dans le rêve il dit, viens, ce n'est rien, et puis il coule sa main dans mes cheveux et tout va bien. il y a la barque des enfants qui glisse le long de la rivière, les petits lapins blancs les crapauds verts, la lune prise dans une toile d'araignée, robert mitchum sur son cheval triste qui chante doucement. mais mon phare, où est passé mon phare ? rouge et blanc dans la nuit noire. quand je grimpais les marches quatre à quatre j'arrivais coeur battant au sommet, mon coeur battait trop vite il me fallait m'asseoir, j'allumais les lumières, je lavais les miroirs, dehors c'était la mer, la nuit, le ciel c'est pareil, dehors c'était le flot un peu flou du monde réel, (je m'en fichais éperdument soit dit entre nous), le monde réel n'est jamais beau que de loin, et que m'importe quand c'est ici que je suis bien, les cheveux étals sur un coussin rouge, avec une serviette babar et une tasse de thé qui sent le poisson fumé.

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