l'immédiate

journal d'O.

mardi 3 décembre 2002

la nuit je rêve que je suis au restaurant avec mon père et un ami de mon père que je ne connais pas, je ne suis pas bien sûre qu'il s'agisse réellement de mon père mais enfin c'est le rôle qu'il semble jouer, quand soudain entre un homme jeune avec des cheveux noirs et de grandes mains très blanches, il est habillé tout de noir et porte un espèce de collier doré et ce qu'il me semble être des boucles d'oreilles, il est très beau, féminin, presque félin, je sais tout de suite qu'il pourrait s'agir de A mais je pense en même temps à certaines peintures d'Egon Schiele, je pense particulièrement à cet autoportrait d'Egon Schiele qui faisait la couverture d'un livre de Marguerite Yourcenar que je n'ai jamais pu lire à cause de ça, à cause du portrait qui ornait la couverture et qui me rappelait brutalement A, A qui était devenu un ami alors, quelqu'un à qui confier ses secrets et pas des moins terribles, mais enfin ce livre de Marguerite Yourcenar je ne pouvais pas le lire, je ne pouvais pas même le tenir dans mes mains, c'était viscéral, ça n'était pas à cause de l'écrit, de ce qu'elle écrivait, ça n'était pas comme ces petits aphorismes amoureux idiots dont elle parsème les très beaux textes de Feux et qui me font tour à tour mourir de rire ou d'affliction (selon l'humeur), non c'était à cause de la couverture même du livre et cette reproduction d'un autoportrait d'Egon Schiele qui me rappelait trop A, qui me semblait flagrant soudain dans l'ombre noire des yeux et puis les traits comme tirés au couteau, cette beauté impossible et qui me faisait un peu peur, ce livre je ne pouvais pas le lire je ne pouvais pas le tenir dans mes mains à cause de la couverture et puis à cause du titre aussi, parce que c'était son prénom.

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