l'immédiate

journal d'O.

samedi 13 juillet 2002

et d'un seul coup dans le ciel devenu rouge, les fleurs folles des feux d'artifice. je n'ai pas compris tout d'abord. il y avait cette grande vague rouge sur le fond noir de ma fenêtre, et puis le bruit, aussi, le bruit lourd des canons, le battement grave d'une salve répétée. j'ai ouvert les croisées. il faisait doux. l'air sentait la poudre et la poussière. les gens descendaient dans les rues. on entendait des cris, des enfants qui pleuraient. j'ai pensé à la guerre, aux bombes dans les tranchées. j'ai eu peur, étrangement, presque envie de pleurer. j'ai eu peur, comme enfant, quand j'entendais sonner tous les samedis midi la sirène des pompiers. c'était idiot bien sûr, et puis les gens riaient, les filles avait mis des robes pour aller danser, c'était idiot bien sûr, je me suis dit que j'avais rarement été en france pour le 14 juillet, mais plus souvent à l'étranger, dans des pays où je n'y pensais pas, où cette fête-là, cette fête d'indépendance-là (amy disait : it's bastille day), ne m'appartenait qu'en ce qu'elle me faisait sentir à la fois fière et lointaine, une éternelle expatriée. alors, descendue tout à l'heure dans la rue comme les autres, dans la foule, la musique, les cris, le bonheur partagé, je me suis sentie si seule soudain, si loin de tout, mon pays, ma nation, je veux dire : l'histoire de l'endroit où je suis née, la mémoire, je me suis sentie si seule soudain, le grand ciel noir tout poudré de lumière, les grandes fleurs folles dans le ciel de juillet.

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